Une habitante de Le Vaud affirme avoir observé trois loups en bordure de champ. Rien d’étonnant à cela, selon le référencement scientifique qui, depuis plusieurs années, révèle la présence récurrente d’au moins un couple installé sur les crêtes du Jura.

Malgré la proximité de l’homme, qui profite pleinement des crêtes du Jura sous toutes leurs formes, le loup semble s’y plaire. Le recensement de ces grands carnivores, opéré par la Direction générale de l’environnement (DGE) en collaboration avec la Fondation Kora, spécialisée dans la gestion de la faune sauvage, atteste de la présence permanente de plusieurs individus entre le massif de La Dôle et le col du Marchairuz.

F19 et M95, un des rares couples connus en Suisse

Les pièges photographiques, relevés par les surveillants de la faune permanents et auxiliaires dans le courant de l’année 2018, ont permis d’identifier deux individus adultes. Il s’agit là d’un des rares couples aussi bien connus par les spécialistes de la Fondation Kora. La femelle F19 et son mâle M95 ont été identifiés par leurs crottes ou des traces de salive à plusieurs reprises entre mars 2016 et février 2019, sur les territoires des communes du Chenit, d’Arzier-Le Muids et Gimel.

Les analyses ADN, réalisées par le Laboratoire de biologie de la conservation de l’Université de Lausanne (LBC) grâce à des échantillons prélevés sur des proies et dans le terrain, permettent de confirmer la présence d’un troisième individu dans le Jura vaudois. «Par ailleurs, un mâle a été observé sur photo, mais rien ne permet pour l’heure de confirmer qu’il s’agit d’un quatrième individu. Aucune reproduction n’a été observée et aucune meute n’est constituée», annonçait un récent communiqué de presse de l’Etat de Vaud.

Un animal qui fait du bruit

Aussi l’annonce, hier, par nos confrères du site d’information heidi.news de loups observés en février à Le Vaud n’a rien d’étonnant pour Najla Naceur, cheffe de la section Stratégie et suivi pour la biodiversité. «Cela correspond au point de situation de notre suivi basé sur des contributions scientifiques. Nous n’avons rien à cacher, mais nous, notre rôle ne consiste pas forcément à communiquer sur chaque cas signalé et pas forcément vérifié.»

Mais face aux risques de buzz lié au loup, la collaboratrice de la DGE reconnaît qu’un effort devrait être consenti pour l’information directe à la population, histoire d’éviter… qu’elle crie au loup! «Nous animons beaucoup de groupes de discussion avec les éleveurs, les forestiers ou les chasseurs. Nous informons les communes concernées de nos relevés, mais nous ne pouvons pas faire face aux réseaux sociaux», reconnaît Najla Naceur.

Nous n’avons rien à cacher, mais nous, notre rôle ne consiste pas forcément à communiquer sur chaque cas signalé et pas forcément vérifié.

NAJLA NACEUR, CHEFFE DE LA SECTION STRATÉGIE ET SUIVI DE LA DIVISION BIODIVERSITÉ ET PAYSAGE À L’ETAT DE VAUD

Les risques de confusion sont nombreux. Pour les spécialistes, une seule observation de photos d’empreintes dans la neige ne saurait confirmer la présence du fameux canidé. «Il faut ramasser des crottes, des poils ou des traces de salive sur les proies pour une identification précise», énumère la spécialiste.

Un instant magique pour la promeneuse

Ce jeudi matin du 14 février dernier, la promeneuse de Le Vaud avait pensé bien faire en photographiant les empreintes dans la neige et en ramassant quelques poils – sans toutefois prendre de gants, ce qui a altéré la possible analyse ADN. «J’ai transmis cela au surveillant de la faune qui n’a pas semblé me prendre très au sérieux», raconte Marie-Françoise Dil.

«Mais dix jours plus tard, il me rappelait pour me confirmer qu’il s’agissait probablement bien de loups, ceux-ci ayant laissé des traces de leur passage entre Le Vaud et La Givrine. Je ne les ai pas photographiés, j’ai juste profité de l’instant présent. C’était beau, un instant magique», se souvient la septuagénaire qui se dit particulièrement observatrice de la nature et de la faune.

Le Risoux est moins un pays de loups

L’observation automatisée du territoire a été renforcée depuis juillet 2017 entre le Marchairuz et la Dôle. «Nos précédents relevés ont montré une plus grande activité dans cette région que dans les forêts du Risoux», constate Najla Naceur qui rappelle que cette tâche de monitorage génère passablement de travail pour le personnel du service de la faune. «Ces données sont indispensables pour appliquer le Plan loup de la Confédération en bonne intelligence avec tous nos partenaires.»

Journal de La Côte